La vie est une maîtresse qui exige de se plier à ses ordres.
« Alors vous avez décidé de l’appeler comment cette petite fille ? » « Alors nous hésitons entre Avdotya et Lana, et aucun des deux ne veut changer de prénom. Du coup pour le moment nous ne savons pas. » « Ben pourquoi ne pas les mettre en prénom composé ? Avdotya-Lana. » En effet déjà à ma naissance, ils ne savaient pas comment m'appeler, ils se battaient pour un simple prénom, ce n'est pas le pied ça. Ensuite ma mère m'avait amenée avec elle et je n'avais jamais revu mon père, d'ailleurs j'ai grandi sans vraiment le connaître. Pour il n'y avait que ma mère et ma grand-mère. Je vivais dans la maison de ma grand-mère et c'était elle qui s'occupait de moi. Ma mère, je la voyais très rarement, et quand elle venait ce n'était même pas pour me voir. Alors j'avais tiré un énorme trait sur ma famille. J'allais à l'école et je ramenais des bonnes notes, d'ailleurs j'allais en ville avec ma grand-mère. J'allais me promener dans le parc et j'allais au cinéma avec elle, j'avais comme une deuxième mère. Mais après des années et des années, la vieillesse l'avait rattrapé. Du coup, elle avait dû aller à l'hôpital, elle avait dû faire des examens pour enfin revenir à la maison. Mais quelques mois après elle ne s'était pas réveillée, elle dormait profondément pour toujours. J'avais dû aller à son enterrement et par la suite trouver un travail, car ma mère ne voulait pas m'aider pareillement pour mon père. Enfin ce n'était pas compliqué, je ne connaissais pas mon père et je ne trouvais pas un seul numéro. Je n'avais trouvé donc qu'une seule solution, faire le même métier que ma mère. Me prostituer, arrêter les cours et les fêtes. Bref, détruire ma vie pour gagner un minimum d'argent. C'est donc ainsi que je me suis retrouvée dans cette merde.
La liberté est le rêve de chaque être humain et chaque être humain doit vivre sa part de rêves.
« Avdotya, tu ne vas pas continuer toute ta vie comme ça, tu te rappelles la première fois où je t’ai retrouvé en pleure ? Allongé au milieu de la rue à moitié nue ? Je ne veux plus te voir comme ça, je ne veux plus te savoir dans un coin avec ces hommes. Tu n’es pas un objet, merde ! » « Tu sais, il est trop tard pour faire marche arrière, je ne peux plus retourner dans le passé. Mes parents ne s’occupent pas de moi, d’ailleurs mon père ne me connaît pas. Ma mère, n’existe même pas à mes yeux. Je n’ai pas d’argent, je n’ai pas de diplôme assez élevé pour avoir un métier. Tu veux que je fasse quoi ? » « Mais Avdo, je ne peux pas te laisser, je ne peux pas fermer les yeux sur ce que tu fais. Rien qu'à l'idée de voir ces hommes poser leurs mains sur ton corps m'écœure... Bats-toi, enfuis-toi fait ce que tu veux, mais arrêtes de te vendre. » À part ma mère, je ne connaissais pas grand monde dans cette ville. Mon père, je ne l'avais jamais connu. Il était soi-disant marié à ma mère, mais depuis mon plus jeune âge je n'avais pas encore vu son visage. Bien trop occupé par son travail, mais en attendant ma mère était toujours une prostituée de bas étage. Moi, j'étais une fille dans les rues, vendant mon corps au premier passant pour survivre. Ma mère ne me donnait pas un sous, mon père ne devait même pas savoir mon existence. J'étais en permanence défoncée et bourrée et toujours en compagnie d'un homme. J'avais plutôt honte, mais je n'avais pas le choix. Je n'avais que ça à faire pour gagner un minimum d'argent pour me nourrir et me loger. C'était minable et je le savais, d'ailleurs seul mon meilleur ami me parlait encore. Il était l'un des seuls à essayer de me sortir de cette galère. Mais quand on a un patron aussi horrible que le mien, ce n'est pas évident. Pas évident de fuir et d'arrêter du jour au lendemain. En effet j'avais peur des représailles, peur qu'il me retrouve et qu'il me fasse souffrir pour au final m'abattre telle une bête. Voilà comme il nous considérait, comme des bêtes sans importance. Je ne dormais pratiquement plus, j'avais peur, peur de retourner travailler. Quand j'étais petite je n'avais jamais imaginé une vie pareille. J'avais toujours voulu être une petite princesse avec son prince charmant et un énorme château. Ce que j'avais en ce moment ce n'était qu'une vieille chambre avec une petite fenêtre, d'ailleurs cette chambre sentait toujours la moisissure. Je n'avais plus l'impression d'avoir une vie, je ne pouvais plus aller en soirée comme avant avec mes amis. Je ne pouvais plus faire l'anniversaire d'une amie, je n'avais plus le droit de rien faire. Je n'étais même plus maître de mes gestes, j'étais soumise à cet homme. Jusqu'au jour où mon meilleur ami et mon soi-disant père m'avaient "kidnappé". Mon père avait réussi à faire tomber cet homme qui nous utilisait comme ces cobayes. Pleins de femmes s'étaient retrouvées libres, elles étaient là-dedans depuis des années sans pouvoir partir. J'allais pouvoir peut-être recommencer une nouvelle vie, j'avais enfin un père. J'avais une maison, un toit où je pouvais dormir et manger sans avoir peur de me retrouver en face d'un autre. J'avais dormi pendant des heures et des heures sans me réveiller et sans bouger, dans ma nouvelle chambre. J'avais pris enfin une bonne douche, le mot douche ne faisait plus vraiment partie de mon langage. Je mangeais ce que je voulais et j'allais reprendre les cours, après tout, c'était ce que je désirais le plus. Après avoir été dans la rue plus de deux ans, je n'avais qu'une envie avoir des études solides pour trouver un boulot fantastique. Je recommençais une toute nouvelle vie, d'ailleurs ma mère avait arrêté son boulot et elle était devenue serveuse dans un restaurant. Une famille reconstituée pour la première fois, ce n'est pas parfait ça ?