Douce illusion, j’étais affalée dans mon lit. Un livre à la main profitant de cette minute d’accalmie pour m’évader l’esprit. Les doux moments comme celui-ci étaient peu nombreux dans ma famille. Il fallait travailler, aider et travailler encore. Une enfance tiraillée entre les tâches ménagères, les études et l’ennuie absolue. Ma chambre se trouvait juste en face de celle de mon frère. Prisonnier dans une vie pleine de règles. Ils nous arrivaient de nous évader ensemble. Une soirée, une mâtiné, un après-midi loin de notre foyer. Un petit rituel qui était devenu habitude. Nous aimions aller à l’encontre des règles. Revenons aux livres que je lisais, la lecture a toujours été importante pour moi. Les livres m’ont permis d’apprendre et de comprendre les choses. Plonger dans ma lecture, mon père cria : « Jackiiiiiiie ! Léoooo venez mettre la table tout de suite ». Mon yeux se levèrent instinctivement. Ma solitude était une nouvelle fois interrompue. Un brin agacé, je me levais et partis rejoindre mes parents aux salons. Mon frère traina du pied, mécontent. J’affichais un sourire en exécutant ma tâche. Mon frère fit : « Sincèrement . Pourquoi vous nous aider pas ? ». À l'époque, Léo faisait preuve d’une grande franchise. Les règles l’emmerdaient. Contrairement à moi, il ne redoutait pas les disputes. Ils fonçaient tête baisser dans les problèmes. Mon père était le genre d’homme à s’emporter rapidement. Ses idéaux étaient fondés. Il s’approcha dangereusement de mon frère. Ses joues étaient rosées, la colère se dessinait peu à peu. « Toujours à la ramener ! Tu t’exécutes et tu poses pas de question, ce n'est pas compliqué » fit-il en lui donnant une petite tapette sur la tête. Un geste qui pouvait paraître sans importance mais qui avait tout son sens. La relation entre mon frère et mon père avait toujours été très tendue. J’approchais doucement et prit la main de mon frère. La table était mise. Dans le couloir, je fis : « arrête de l’énervé, un jour il te fera vraiment mal ! » dis-je avec insistance. J’avais été toujours comme ça, inquiète pour mon frère. Notre relation était parfaite avant qu’il ne décide de quitter la ville pour partir loin, beaucoup trop loin me laissant seul avec un père autoritaire et une mère absente.

L’amour, un bien grand mot pour une jeune adolescente de dix-neuf ans. J’avais appris à vivre sans mon frère partie vivre en Italie. J’avais grandi, je m’étais renfermé et j’avais appris à vivre sans mon frère. Plusieurs mois après son départ, je suis tombée amoureuse. Cet homme était parfait. Gentil, marrant et attachant. Des qualités qui étaient pour moi existentielles à l'époque. J’avais besoin de me sentir différente. Nous nous étions rencontrés à la bibliothèque. Un lieu qui pouvait paraître étrange pour certain, peu attrayant et complètement ennuyant. Pour nous, il avait été le lieu de notre rencontre. Nous nous sommes tout de suite bien entendu. Echangeant de nombreuses conversations. J’aimais ses valeurs, ses qualités et ses défauts. Je me suis très vite attacher, trop vite en y repensant aujourd’hui. Nous sommes sortie ensemble, il a rencontré mes parents et nous avons couché ensemble. Il a été ma première fois. Mes souvenirs, mes impressions ? Catastrophique. Je n’ai pas aimé, la fougue avait rendu l’acte que trop douloureux. Je n’avais pas été à la hauteur. L’amour qui se dégageait de notre couple s’était éteint et plusieurs semaines après il s’en sont allé. Laissant derrière lui, un cœur brisé. Cette année fut pour moi la plus difficile. Depuis ce jour, je n’ai pas couché avec d’autre hommes. La peur de ne pas être à la hauteur. Peu de personnes sont au courant de cette histoire, pas même mon frère, pas même ma meilleure amie. Un secret enfoui qui malgré les années me consument chaque jour.

« J’en ai marre ! Je pars » la phrase avait été lâcher. Une bombe qui n’attendait qu’à exploser. J’avais besoin de partir, de changer de vie. Mon père me regarda dans les yeux. Un regard que je connaissais très bien. J’avais grandi et muri. Mon caractère s’était développé. La vie m’avait appris certaines choses. L’indépendance. Il me fit : « allez va rejoindre ton frère, tu ne vaux pas mieux que lui ». Mon père était en colère contre moi, contre mon frère. Nous prenions un tout autre chemin, loin de Sydney, loin de nos parents. Il m’avait fallu plusieurs années pour comprendre pourquoi mon frère était partie. L’indépendance, la liberté l’avait poussé à fuir vers une vie plus seine, plus sereine. J’avais envie de ça, envie de vivre ma vie sans me préoccuper de ma mère ou de mon père. J’avais tout simplement envie de vivre. Je lui fis fébrilement avant de partir : « Tu ne changeras pas mais dis toi au moins que tes enfants seront heureux loin de toi ». Cette phrase était lourde de reproche. Mon enfance avait été gâcher et je ne comptais pas gâcher une minute de plus ici. J’embrassais ma mère et partie direction l’ile de Burano en Italie. L’occasion pour moi de renouer avec un frère perdu depuis plusieurs années.

Voilà trois ans que je suis partie de chez moi. J’aime ma vie et sans grande surprise Sydney ne me manque pas. Je suis fleuriste à temps partiel cela me permet de payer mes études. J’étudie les lettres. J’habite dans un petit appartement non loin de mon frère. Ma vie est vraiment parfaite, je ne me prends plus la tête. J’apprends à apprécier les joies de la vie.